"LINA LINA" Par Michela Musolino
- sonicsouvenirssaga
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“Lina Lina” de Michela Musolino, réalisée en collaboration avec le groupe de musique folklorique sicilien I Beddi, redonne vie à une ancienne tradition méditerranéenne à travers la musique. S’inspirant de la cialoma, un chant traditionnel entonné par les pêcheurs lors de la Mattanza — l’abattage annuel des thons au large de Favignana — Musolino transforme ce chant de travail ancestral en une expérience folk contemporaine, tout en conservant ses racines profondes. Son interprétation de cette chanson responsoriale reflète à la fois la mémoire poignante et la force collective de cette tradition.
La Mattanza était bien plus qu’une simple pratique de pêche : c’était un rituel intense, presque sacré. Entre mai et juin, les thons migrateurs étaient piégés dans un système complexe de filets, menant à une récolte dramatique et sanglante. Alors que les pêcheurs travaillaient de concert pour remonter les filets à bord des muciare — les barques noires utilisées pour l’abattage — ils chantaient la cialoma afin de coordonner leurs efforts. Dans “Lina Lina,” la voix de Musolino mène cet appel, suivie par le chœur en réponse, recréant ainsi la dynamique de groupe des tonnaroti (pêcheurs de thon) et insufflant au morceau un sentiment d’urgence et de solidarité.
Ce qui rend “Lina Lina” particulièrement captivante, c’est l’équilibre subtil entre joie et gravité. L’accordéon entraînant et le chœur dynamique contrastent avec le thème sous-jacent de la mort, omniprésent dans le récit. La frénésie de l’abattage est traduite dans le tempo et l’intensité vocale, reflétant le chaos : les bateaux qui tanguent, les cris des pêcheurs, les bonds désespérés des poissons et l’eau rougie de sang. La chanson ne détourne pas le regard de ces images puissantes, mais les embrasse, mêlant le sacré et le brutal — la vie et la mort — dans une tradition typiquement méditerranéenne.
Musolino insuffle également une dimension spirituelle à la chanson, avec des tonalités arabes qui accentuent l’atmosphère mystique et prièreuse. Son interprétation relie le passé et le présent, faisant de “Lina Lina” non pas une simple reconstitution historique, mais une tradition vivante. C’est un acte de préservation culturelle porté par la mélodie et le rythme, aussi puissant qu’émouvant, qui rend hommage à la force et à l’identité collective des générations passées.
Un moment particulièrement émouvant s’est produit lors d’un concert dans la ville côtière sicilienne de Nizza. Après avoir raconté l’histoire de “Lina Lina,” Musolino a réalisé qu’elle chantait devant un public de pêcheurs et de leurs familles — les héritiers directs de la tradition évoquée. En les invitant à participer au chant responsorial, la performance s’est transformée en une célébration collective. Cet instant partagé a inspiré l’enregistrement officiel de la chanson, en faisant un hommage vibrant et un témoignage vivant du cœur culturel de la Sicile.
Écrit par Kaïa








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